MOSCOU
La menace du bouclier américain sur la Russie déclenche-t-elle une réaction à la «soviétique»? Sans doute. Les stigmates de la guerre froide réapparaissent avec cette nouvelle inquiétante: des bombardiers stratégiques russes pourraient être déployés à Cuba en réponse à l’implantation du bouclier antimissile en Europe de l’Est. Ceci représente un nouvel épisode dans l’escalade des tensions suscitées par un élargissement à l’est de l’OTAN.
Les dépêches de l’Agence russe d’information Novosti, 26 ans après un épisode qui a manqué de jeter le monde dans le chaos d’une guerre thermonucléaire, ont de quoi inquiéter. Nonobstant un contexte mondial différent, le scénario est étrangement similaire, mais cette fois-ci ce sera avec une nouvelle distribution: les présidents Bush et Medvedev ont remplacé Kennedy et Khrouchtchev.
Dans une interview accordée hier au quotidien moscovite Izvestia, l’ancien commandant en chef des Forces aériennes russes, le général Piotr Deinekine informe que le déploiement des bombardiers russes à Cuba constituerait une réponse adéquate à l’installation de bases militaires de l’OTAN aux frontières de la Russie. Ce fait n’est en soit pas nouveau. Cette situation est confirmée au quotidien russe par une source haut placée: «l’aviation stratégique russe utilise déjà les aérodromes cubains».
La Russie se sent menacée
Nouveau développement ou intox? Moscou se sent effectivement menacé et a exprimé plusieurs fois son hostilité à l’initiative militaire américaine. En février, à la Conférence sur la sécurité de Munich, le président russe Vladimir Poutine avait clairement condamné la politique étrangère de Washington. En marge de cette conférence, le général russe Nikolai Solovtsov avait présenté les bases militaires américaines comme «une cible potentielle pour les missiles russes».
La tension est montée d’un cran lorsqu’un accord a été signé le 8 juillet par la Secrétaire d’Etat américaine à Prague. Un radar antimissile américain sera installé en République tchèque. Une base de l’OTAN en Pologne abrite une batterie de 10 missiles intercepteurs.
Elargissement de l’OTAN: Stratégie américaine d’encerclement
Il y a aussi des plans pour établir d’autres bases en Géorgie. Située aux frontières sud-est de la Russie, cette ex-république soviétique est candidate à une adhésion à l’OTAN au même titre que l’Ukraine. Une «révolution orange» a eu lieu récemment dans ce pays sous l’égide des Etats-Unis. L’implantation de bases dans le Caucase représenterait un double avantage géostratégique de taille pour le Pentagone: une situation au centre des anciennes républiques soviétiques (Abkhazie, Tchétchénie, Arménie et Azerbaïdjan) et une présence aux frontières nord de l’Iran.
L’Europe craint que l’adhésion de l’Ukraine et de la Géorgie à l’OTAN n’entraîne une dégradation de ses rapports avec la Russie et une escalade de la tension entre Washington et Moscou. C’est chose faite.
Christian Brülhart, ©2008 – Tous droits réservés
Des avions russes à Cuba pour contrer le bouclier américain? (Izvestia)
Aviation russe à Cuba: une réponse possible aux bases de l’OTAN près des frontières russes (expert)
Suite à cet article, je me permets de publier un communiqué de l’ATS:
Date: 05/11/2008 11:24 URGENT Russie Bouclier américain:
Moscou va déployer des missiles à Kaliningrad
Moscou (ats/afp/reuters) La Russie va déployer des missiles dans la région de Kaliningrad, enclave russe entourée de pays de l’UE, a annoncé mercredi le président russe Dmitri Medvedev. Elle entend ainsi «neutraliser» les éléments du bouclier antimissile américain qui seront installés en Europe. «Pour neutraliser en cas de nécessité le système de défense antimissile, on va déployer dans la région de Kaliningrad le complexe de missiles Iskander», a déclaré le président russe dans sa première adresse annuelle à la nation. La Russie, a-t-il ajouté, recourra à des moyens de brouillage électronique contre ce projet américain que les Russes considèrent comme une atteinte à leur sécurité nationale. L’enclave de Kaliningrad est située sur la Baltique, entre la Pologne et la Lituanie. Dmitri Medvedev a toutefois dit espérer que la «nouvelle administration américaine» dirigée par Barack Obama optera pour de «bonnes relations» avec la Russie. Le président russe avait auparavant lancé une violente charge contre l’actuelle administration du président républicain George W. Bush. Il avait notamment accusé les Etats-Unis d’avoir conduit, par leur politique «présomptueuse», à la guerre en Géorgie et à la crise financière internationale. ro
Voilà le résultat. Ce n’était pas étonnant et cela confirme-t-il un retour à une nouvelle Guerre froide?
Suite des communiqués de presse relatifs à la 2ème guerre froide (celle déclenchée par l’initiative du bouclier stratégique):
MOSCOU, 5 novembre – RIA Novosti.
La Russie ne fléchira pas dans le Caucase, a déclaré mercredi le président russe Dmitri Medvedev dans son message à l’Assemblée fédérale (parlement russe).
« Nous ne fléchirons pas dans le Caucase. Nous surmonterons les conséquences de la crise économique mondiale et nous en sortirons plus forts », a indiqué M.Medvedev dans son premier message au parlement en qualité de président du pays.
La Géorgie a attaqué l’Ossétie du Sud dans la nuit du 7 au 8 août et sa capitale Tskhinvali, faisant largement appel aux chars et à l’artillerie lourde. La Russie a été obligée de lancer une opération militaire pour imposer la paix à Tbilissi et protéger ses ressortissants dans la république. Le 26 août, Moscou a reconnu l’indépendance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, deux républiques autoproclamées sur le territoire géorgien.
Commentant ses activités au poste de chef d’État, Dmitri Medvedev a déclaré qu’être président n’était pas facile. « Il est très difficile de prendre des décisions dont dépendent la vie, le bien-être et la santé des milliers de gens, ainsi que la réputation et le sort d’un grand peuple. Il faut savoir qu’il y a des choses auxquelles il ne faut jamais renoncer », « pour lesquelles il faut lutter et vaincre, qui sont chères à vous, à moi, à tout le monde et sans lesquelles nous ne pouvons pas imaginer notre pays ».
« Notre peuple est riche du point de vue spirituel et moral. Nous avons de quoi être fiers, des choses à aimer, à défendre et à atteindre », a conclu le président.
BRUXELLES, 6 novembre – RIA Novosti.
La commissaire européenne aux relations extérieures, Benita Ferrero-Waldner, a critiqué mercredi la déclaration du président russe Dmitri Medvedev sur le déploiement de missiles Iskander dans la région de Kaliningrad pour neutraliser le bouclier antimissile américain en Europe.
« Je voudrais savoir à quel point ces démarches sont compatibles avec la nouvelle stratégie de sécurité en Europe que les Russes veulent tant mettre en place », a déclaré Mme Ferrero-Waldner lors de son intervention au Parlement européen à Bruxelles.
Selon elle, l’installation dans la région de Kaliningrad de missiles russes « ne contribuera guère à la sécurité en Europe ».
Dans son premier message annuel au parlement, le président russe Dmitri Medvedev a évoqué le possible déploiement de missiles de théâtre Iskander dans l’enclave de Kaliningrad, coincée entre la Lituanie et la Pologne au bord de la Baltique, pour contrecarrer la menace du bouclier antimissile américain.
Washington envisage de déployer en Europe de l’Est des éléments de son bouclier antimissile pour parer à d’éventuelles attaques venant d’Iran ou de Corée du Nord. Les Etats-Unis comptent ainsi installer un radar en République tchèque et dix missiles intercepteurs en Pologne. Moscou, se sentant menacé, a exprimé à plusieurs reprises son hostilité envers ce projet malgré les tentatives américaines pour rassurer la Russie.
Date: 07/11/2008 11:41
Contrôle des armements: Washington veut reparler désarmement avec la Russie. Eclairage
Moscou/Washington (ats/reuters) La Russie a promis d’étudier une série de propositions récemment adressées par les Etats-Unis pour relancer rapidement les négociations sur le contrôle des armements. Les relations entre les deux pays sont actuellement tendues en raison du projet américain de bouclier antimissile. «Nous avons reçu ces propositions et nous les étudierons», a déclaré vendredi un responsable du ministère des Affaires étrangères à l’agence Interfax.
Moscou montre ainsi qu’il ne ferme pas la porte aux discussions, deux jours après l’annonce par le président Dmitri Medvedev du déploiement de missiles à Kaliningrad pour «neutraliser» le bouclier antimissile américain.
La Russie souhaite conclure un nouveau traité de désarmement pour remplacer l’accord START signé par les présidents George Bush Sr et Boris Elstine en 1991. Ce document limite les arsenaux nucléaires des deux grandes puissances. Mais la Russie insiste pour régler au préalable la question du bouclier antimissile. Prochaine rencontre Moscou considère ce projet, dont des éléments doivent être déployés en Pologne et en République tchèque, comme une manoeuvre d’encerclement et une menace à sa sécurité nationale.
Washington se défend de viser Moscou par ce système destiné selon lui à prévenir des attaques d’Etats «voyous». «Nous cherchons à ouvrir un dialogue solide avec les Russes», a déclaré jeudi le sous-secrétaire d’Etat américain chargé du contrôle de l’armement, John Rood. Rood a précisé qu’il tentait de fixer la date d’une rencontre avec son homologue russe, le vice- ministre des Affaires étrangères Serguei Riabkov, et que celle-ci pourrait avoir lieu dans les deux prochaines semaines à Moscou. Les Etats-Unis ont adressé il y a deux semaines à la Russie leurs propositions visant à proroger et amender le traité START de réduction des arsenaux stratégiques. Washington a en outre envoyé cette semaine un document détaillant des mesures pour améliorer la transparence et la confiance mutuelle afin de répondre aux objections russes vis-à-vis du bouclier. Les Etats-Unis proposeraient notamment aux Russes d’inspecter les sites polonais et tchèque où seront installés une batterie de missiles antimissiles et une station radar.
Moscou se donne le temps
Selon l’expert américain en armement Daryl Kimball, l’administration Bush, qui quittera le pouvoir le 20 janvier, n’aura cependant ni le temps ni l’influence nécessaire pour convaincre le Kremlin. Moscou «va attendre de voir ce que la prochaine administration lui propose», explique-t-il. Le futur président américain Barack Obama s’est déclaré favorable à un dispositif de protection des Etats-Unis et de leurs alliés contre d’éventuelles attaques, mais a prévenu qu’il devrait être «pragmatique» et efficace économiquement. Le président élu mardi est aussi partisan d’une réduction des arsenaux nucléaires. vf